LA RESPONSABILITÉ RENFORCÉE DES DIRIGEANTS DE FAIT EN MATIÈRE DE PROCÉDURE COLLECTIVE

Julie D.
Julie D. Juriste
Rédactrice chez Visio Conseils Pro
Mis à jour le 11/08/2024
LA RESPONSABILITÉ RENFORCÉE DES DIRIGEANTS DE FAIT EN MATIÈRE DE PROCÉDURE COLLECTIVE
La responsabilité renforcée des dirigeants de fait en matière de procédure collective fait référence à l'obligation accrue qui pèse sur les personnes ayant exercé de facto le contrôle ou la direction d'une entreprise en difficulté lorsqu'elle est confrontée à une procédure collective, telle qu'une liquidation judiciaire ou un redressement judiciaire.

Sommaire

En droit des sociétés, les dirigeants de fait sont ceux qui, sans détenir formellement le titre de dirigeant (comme président, directeur général, etc.), exercent en réalité un contrôle ou une influence significative sur la gestion de l'entreprise. Cette notion est importante car elle permet de couvrir les cas où une personne exerce un contrôle effectif sur une entreprise sans en avoir officiellement le titre.
Dans le contexte des procédures collectives, les dirigeants de fait peuvent être tenus responsables des dettes de l'entreprise dans certaines circonstances. Cette responsabilité peut découler de diverses sources légales, telles que la législation sur les faillites ou les règles régissant la responsabilité des administrateurs. Les dirigeants de fait peuvent être considérés comme ayant participé à des actes de gestion imprudente, de fraude ou de négligence grave ayant contribué à la détérioration de la situation financière de l'entreprise.
La récente décision de la Cour de cassation, chambre commerciale, du 7 février 2024 (pourvoi n° 23-40.016) marque une évolution significative dans le traitement juridique des dirigeants de fait en France. En affirmant que ces derniers peuvent être tenus responsables de ne pas avoir demandé l’ouverture d’une procédure collective, la Cour de cassation étend leurs obligations et les sanctions possibles, les alignant avec celles des dirigeants de droit. 
 

CONTEXTE JURIDIQUE ET DÉFINITION DU DIRIGEANT DE FAIT

En droit français, la distinction entre dirigeant de droit et dirigeant de fait est essentielle pour comprendre la répartition des responsabilités au sein des entreprises. Le dirigeant de droit est officiellement désigné par les statuts de la société ou par une décision de l'assemblée générale. À l'inverse, le dirigeant de fait est une personne qui, sans avoir le titre officiel, exerce effectivement les fonctions de direction de l'entreprise. L’article L631-1 du Code de commerce impose aux dirigeants de droit de demander l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire dès qu’ils constatent la cessation des paiements. Par ailleurs, l’article R631-1 précise que cette demande doit être déposée par le représentant légal de la personne morale. Ce dernier article n’évoque pas explicitement la situation des dirigeants de fait, créant une zone grise juridique.

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION

Le 7 février 2024, la Cour de cassation a jugé que les dirigeants de fait peuvent être tenus responsables et sanctionnés pour ne pas avoir demandé l’ouverture d’une procédure collective, même si l'article R631-1 reste silencieux à leur sujet. Cette décision repose notamment sur les articles L651-2 et L653-8 du Code de commerce, qui permettent d'engager la responsabilité des dirigeants de fait pour les fautes de gestion ayant contribué à l’insuffisance d'actif d'une société en liquidation judiciaire. Cette jurisprudence clarifie que les obligations de gestion financière d'une entreprise s'appliquent également aux dirigeants de fait, indépendamment de leur reconnaissance formelle.

ÉLARGISSEMENT DE LA RESPONSABILITÉ DES DIRIGEANTS DE FAIT

La décision de la Cour de cassation élargit significativement la responsabilité des dirigeants de fait. Ces derniers sont désormais soumis aux mêmes obligations que les dirigeants de droit en ce qui concerne la déclaration de la cessation des paiements. En d'autres termes, une personne exerçant effectivement des fonctions de direction doit se conformer aux obligations légales, sous peine de sanctions. Cette décision vise à éviter que les dirigeants de fait échappent à leurs responsabilités en raison de leur statut non officiel. Ainsi, la jurisprudence assure que ceux qui dirigent de facto une entreprise assument pleinement leurs responsabilités, au même titre que les dirigeants officiellement nommés.

SANCTIONS RENFORCÉES POUR LES DIRIGEANTS DE FAIT

La Cour de cassation a renforcé les sanctions à l'encontre des dirigeants de fait. Ces derniers peuvent être condamnés à combler le passif de la société en liquidation judiciaire. En outre, ils peuvent faire face à d'autres sanctions personnelles, telles que l'interdiction de gérer ou la faillite personnelle, conformément aux articles L653-1 et suivants du Code de commerce. Ces mesures visent à protéger les créanciers et à garantir que ceux qui exercent effectivement le contrôle d'une société ne puissent pas échapper à leurs responsabilités. En reconnaissant la responsabilité des dirigeants de fait, la Cour de cassation établit un précédent important qui clarifie les conséquences juridiques des actes de gestion défaillants, indépendamment du titre officiel de la personne concernée.

PROTECTION DES CRÉANCIERS

La protection des créanciers est un enjeu crucial dans la gestion des procédures collectives. En tenant les dirigeants de fait responsables de leurs actes de gestion, la décision de la Cour de cassation vise à garantir que les créanciers ne subissent pas les conséquences de la mauvaise gestion des dirigeants non officiels. Cette décision assure que les créanciers peuvent obtenir réparation des préjudices causés par une gestion défaillante, même si celle-ci est le fait d'un dirigeant de fait. En renforçant la responsabilité des dirigeants de fait, la jurisprudence protège les créanciers et encourage une gestion plus rigoureuse et transparente des entreprises.
La décision du 7 février 2024 s'inscrit dans une continuité jurisprudentielle visant à responsabiliser tous ceux qui exercent un pouvoir décisionnel dans une entreprise. La Cour de cassation avait déjà reconnu, dans des décisions antérieures (notamment Cass. com., 8 novembre 2011, pourvoi n° 10-23.377), la possibilité de poursuivre les dirigeants de fait pour des fautes de gestion ayant conduit à la cessation des paiements. Cette jurisprudence démontre une volonté claire des juges de ne pas laisser impunis les comportements fautifs des dirigeants de fait, en les tenant responsables au même titre que les dirigeants de droit. La continuité jurisprudentielle renforce le message selon lequel les responsabilités de gestion doivent être assumées pleinement par ceux qui exercent réellement le pouvoir décisionnel.
 

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2 commentaires
  1. JUGDXFRBpaui
    28/08/2024
    uXKwtPGnbD
  2. JUGDXFRBpaui
    28/08/2024
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